" – Peu importe d’où l’on vient. Il n’y a pas de tonique. Le thème et son développement ne sont qu’un mirage…
Il y a une musique toujours inattendue.
– Et les dissonances ?
– Dieu les a créées, elles aussi…"
Jaume Cabré - "Voyage d'hiver" - 2014

”La terre, il se pourrait bien après tout que ce soit une espèce
de merveilleux petit appareil enregistreur, plaçé là par on ne sait qui,
pour capter tous les bruits qui circulent mystérieusement dans l’Univers.”
Pierre Reverdy - ”En vrac” - 1929

”J’entends tous les bruits de la terre grâce à mes oreilles et mes nerfs de cristal
dans lesquels circulent le feu du ciel et celui des volcans.”
Michel Leiris - ”Le point cardinal” - 1927

"L'écoute, c'est l'ombre de la composition"
Pascal Dusapin - 2008

 

31/08/2023

On n’entendait rien.

glacier d'Aletsch

”On n’entendait rien. On avait beau écouter, on entendait rien du tout: c’était comme au commencement du monde avant les hommes ou bien comme à la fin du monde, après que les hommes auront été retirés de dessus la terre, - plus rien ne bouge nulle part, il n’y a plus personne, rien que l’air, la pierre et l’eau, les choses qui ne sentent pas, les choses qui ne pensent pas, les choses qui ne parlent pas. On écoutait, il ne venait rien, c’était une nuit sans vent; on écoutait encore, il ne venait toujours rien.”

La grande peur dans la montagne Charles Ferdinand Ramuz - 1925

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24/08/2023

Latino bar


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
An excerpt of the amazing movie "Latino bar" - 1990 - directed by the mexican movie-maker Paul Leduc with a scenario inspired by the novel "Santa" by Federico Gamboa (1903).
This movie without any speaking voices, describe, in a mugginess air and a threatened despair, the destiny of a black prostitute and a drifting lover, with a splendid musical score
including Beny More, Tabu Ley Rochereau, José Antonio Mendez and other latin music.




RETOUR AU LATINO BAR

par Alain Ménil
extrait d'un texte publié par la revue d'ethnologie "Tanyaba" - 1993 -

"... L'esprit de cette musique, ou l'esprit du lieu : tel est ce blues tropical qui envahit l'atmosphère, et qu'il est pourtant si difficile d'en reconnaître la présence, que nous sommes le plus souvent enclin à en refuser la manifestation, ou à en dénier l'existence, lorsque nous nous heurtons à quelques uns de ses signes. Le blues n'est pas réductible à un genre musical, à un lieu, à un moment de l'histoire. Il est le nom moderne d'un antique malaise, il est la voix qui cherche à guérir en s'épanchant, il est cette impossible adhésion à ce qui est et qui va, quand cela nous passe de toutes façons, et que nous n'avons plus la force ou le goût de nous en emparer. Pour sûr, en parlant de blues, l'on songera à d'autres rythmes, à d'autres sonorités, de guitares et d'harmonica, de cordes triturées et qu'un hoquet de la voix accompagne : voix du Sud profond des Etats-Unis, figurant la désolation d'une âme dans la monotonie d'un décor et d'une mélodie. Blues encore rural d'une voix ayant emprunté les chemins vicinaux pour trouver la grand-route, voix d'un blues qui ne se sera pleinement urbanisée qu'en remontant peu à peu vers le Nord, avant de se fondre dans les grandes métropoles à un jazz plus évolué. Tout cela est juste, et vrai, et l'on dira que le blues dont on parle à propos des Tropiques, est tout différent : qu'il est trop rural pour être citadin, que son insertion urbaine est de toutes façons trop récente, trop précaire. Ce n'est pas encore le blues des solitaires : le solitaire appartient à la grande ville moderne, à la métropole développée et industrielle. C'est le blues d'une communauté en mal de racines communes, c'est le blues de l'esseulé dont la condition première est de se sentir privé de tout le reste, même de ce qui lui tient compagnie. Blues du déracinement qui n'a pas encore fait souche, blues de ce qui s'est arraché à un cadre que l'on a continué d'emmener par devers soi, sans parvenir pour autant à l'accrocher. Du reste, serait-il connu et reconnu qu'il ne serait pas pour autant partagé : ce blues est celui qui saisit l'individu au bon milieu de sa communauté, et l'empêche de s'y souder, de s'y fondre, comme de s'unir à sa terre. C'est celui qu'aura saisi magnifiquement Paul Leduc, dans son très beau, et très méconnu Latino bar. Mais c'est qu'au fond, ce blues n'est ni de la ville ni de la campagne : des faubourgs, peut-être, là où se tiennent ceux qui s'en viennent d'ailleurs, ou qui en repartiront vite, voix de va et vient propres à ceux qui s'accrochent faiblement et fragilement à un univers instable et inhospitalier.

Non, le blues n'est expression authentique que de l'âme, et d'une âme inconfortablement installée dans le mitan des choses et des êtres. C'est pourquoi tout l'esprit de cette musique s'en détourne, faute de pouvoir y asseoir sa confiance. Aussi ne lui reste-t-il qu'à se retourner bien vite vers le corps, et à défaut d'être toujours assuré de persuader celui dont la proximité avec le nôtre permettrait de réchauffer la faible confiance que nous avons en toute chose, à confier au seul des corps que nous pouvons le mieux appréhender, le nôtre, l'unique espoir qui soit à notre mesure : se sentir vivant, et de se sentir en vie, tirer joie et contentement. Alors le remède peut venir : à condition d'avoir préparé l'esprit, et disposé le corps à cette redécouverte. Le son  ainsi n'avance qu'en promettant en effet une guérison, par delà les mots attristants qu'il fait entendre. Car c'est au rythme seul qu'il a confié le soin de nous guérir, ou plus modestement, qu'il propose d'endormir la douleur qui nous retenait au bord de toutes ces images d'un passé et d'un lieu abandonnés, car c'est bien en effet la douleur qu'ils suscitaient en nous qui nous interdisait en même temps de nous en approcher véritablement. Alors oui, doucement peut reprendre le chant sans fin des criquets, et le suave cadencement de l'impair. Mais il y faut les notes qu'un piano, une flûte et un archet asthmatiques savent faire entendre lorsqu'ils ont consenti à l'esprit du blues, qui n'est d'aucun lieu, pour les avoir tous parcourus." 


The complete text in french here
 
préalablement publié en mars 2012
 
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19/08/2023

Karlrecords news

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Some new (recent) releases from the Berlin label Karlrecords

 

 

zeitkratzer / Reinhold Friedl: Scarlatti


for choregraphy, simply limpid, amazing rythmic unison for a septet ensemble  

Reinhold Friedl composed the music for a choreography by dance company Rubato. The music is drawn from Scarlatti, and the piano sonata F-minor K.466 is twisted anew in all its richness, shifted back and forth, declined, frozen, noisified, sound structures extracted, floating. 


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An Moku I Stefan Schmidt / Raum im Raum

with An Moku and Stefan Schmidt for dark landscapes' sonic trip

 


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hÄK / Danzeisen

 
raw energy with our good friend hÄK, hypnotic trances, musical drifts between acoustic and electronic devices
 with 
Philipp Danzeisen: drums, percussion
B. Norbert Würtz alias hÄK: modular synth, electronics 
 

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Karlrecords, an ecclectic program from Bill Laswell to Xenakis, Otomo Yoshihide to Pita, Alvin Lucier to James Tenney, adding lot of contemporary artists all categories.


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15/08/2023

L'art de la fugue


 
Hermann Scherchen  conducting the BWV 1080 from Jean Sébastien Bach' s "Art de le fugue ".
 
A brilliant lesson of what would be the fugue.

<<<here>>> 
 

This extract is included in the DVD box "Les grandes répétitions", a serie of rehearsals filmed by Gérard Patris and produced in the 60s by "Le service de la recherche" of the french national radio, founded by Pierre Schaeffer.
These 5 remarkable movies are focused on Cecil Taylor, Edgar Varèse, Karlheinz Stockhausen, Olivier Messiaen and Hermann Scherchen. 

++II++

02/08/2023

Argot du sonore (7)



Mots et expressions d’argot ancien (en provenance de plusieurs dictionnaires rédigés entre 1808 et 1907) qui se rapportent au domaine du sonore, du musical et du domaine du ”parlé”, du ”dit”, de ce qu’on entendait au 19éme siècle.

Les principales sources sont les suivantes: d’Hautel, 1808 - Delvau, 1867 - Rigaud, 1881 - Virmaître, 1894 - Clémens, 1840 - Larchey, 1865 -  Halbert, 1849 - Rossignol, 1901 -

déjà publiées les lettres A-B   C  &   D-E-F  &  G-H  J-K-L M-N-O


P

Paire de cymbales : Pièce de dix francs (argot facétieux des faubouriens).
Pallasser : Faire des phrases, discourir avec emphase.
Pallasseur : Faiseur de discours, bavard. Celui qui a l’habitude de faire de belles phrases, des pallas.
Panachée : Conversation variée.
Papotage : Causerie familière ; bavardage d’enfants ou d’amoureux (argot des gens de lettres).
Papoter : Babiller comme font les amoureux et les enfants, en disant des riens.
Parlage : Pour bavardage, abondance de paroles inutiles, et qui n’ont le plus souvent ni rime ni raison.
Parlement : C’est un parlement sans vacances. Se dit par mépris d’un homme qui ne décesse de parler, d’un grand babillard.
Parlementage : Pour propos, commérage, bavardage ; discussion, conversation frivole, qui ne peut qu’être nuisible. Discours, conversation.
Parler chrétien : Parler nettement, clairement, de façon que personne ne s’y trompe.
Parler en bas-relief : À voix basse, entre ses dents (argot des artistes).
Parlerie : Bavardage, propos, commérage, caquetage.
Parleur : Faire le beau parleur. Affecter un langage précieux et ridicule.
Parlotter : Bavarder.
Parlotteur : Bavard.
Pas si cher : Silence, parlez plus bas, on nous écoute. Expression employée dans les prisons pour signaler l’arrivée d’un gardien qui punirait les causeurs.
Payer la goutte (faire) : Siffler (argot des coulisses). Siffler un acteur. 

Peau d’âne : Tambour (argot des troupiers), qui ne savent pas que cet instrument de percussion est plus souvent recouvert d’une peau de chèvre ou de veau. Faire chanter ou ronfler la peau d’âne. Battre le rappel (argot du peuple), à qui cette chanson cause toujours des frissons de plaisir.
Penaud : Il est penaud comme un fondeur de cloches. Pour dire que quelqu’un est honteux de n’avoir point réussi dans une affaire.
Pendule à plumes :  Coq (argot des gens de lettres). Le coq qui chante chaque matin à heures fixes. On dit également réveil-matin. C’en est un très économique qui n’a pas besoin d’être remonté et qui a l’avantage de pouvoir être mangé quand il a cessé de plaire (argot du peuple).



 

 

 

 

 

Pétard, Petgi : Esclandre, tapage, scène violente et imprévue c’est le moment qui suit la découverte du pot-aux-roses. Lorsqu’un mari revient à l’improviste de la chasse, et que sa femme… il fait un pétard s’il est expansif et verbeux.
Pétardier : Celui qui a l’habitude de faire du pétard. Pétardier est aussi celui qui se fâche, qui s’emporte à tous propos. Une femme est pétardière.
Pétardier, pétardière : Faire du tapage, du bruit.
 "Ah ! tu sais, il ne faut pas remmener quand il a le nez sale, c’est un pétardier" (argot du peuple).
Piailler : Crier, dire des injures, jeter les hauts cris.
Piaillerie  : Criaillerie, clabauderie.
Piailleur : Celui qui ne fait que piailler; qui crie pour la moindre chose. Homme qui aime à gronder, à crier après les gens. On dit aussi Piaillard.
Pianiste : Valet de bourreau. Celui qui accompagne le bourreau comme un pianiste accompagne un chanteur ; celui qui joue une partie accessoire dans la représentation de la mort juridique (jargon des voyous).
Piano : Cuisinière, ainsi nommé par les chefs de cuisine.
Piano (jouer du) : Trotter d’une manière irrégulière (jargon des maquignons).
Piano (vendre son) : ”Le moindre récit pathétique, une phrase sentimentale, un mot touchant, un mouchoir sur les yeux, une larme et la croix de sa mère, tout cela se traduit par: vendre son piano. Depuis le jour où Bouffé, dans Pauvre Jacques, fit couler des ruisseaux de larmes dans une scène où il est forcé de vendre son piano, les verbes s’attendrir, pleurer, s’apitoyer, larmoyer, etc. ont été remplacés par : vendre son piano.” (J. Duflot.)
Pianoter, Jouer du piano : Filouter.
Piaulard : Qui crie, qui pleure toujours. Le peuple prononce pialard.
Pie-grièche : Femme criarde et querelleuse
Pipe (une) : Saxophone recourbé.
Platine : Pour dire une bonne langue, une voix forte, un gosier rustique.
Il a une bonne platine. Se dit d’un grand babillard, d’un homme qui parle avec une grande volubilité et pendant long-temps ; d’un crieur public qui fait de grands efforts de voix. Verve, faconde, bavardage. Parler longtemps ; mentir avec assurance. Voir grelot.
Platine (bonne) : Langue bien pendue, loquacité, bavardage.


 

 

 

 

 

Plats à barbe : Grandes oreilles.  Cymbales.
Poser sa chique : Garder le silence
Pot à confiture : Tambour de musique.
Potiron : Ce mot est en butte à plus d’un barbarisme : les uns disent paturon, et les autres poturon ; c’est potiron qu’il faut dire pour bien parler.
Pousser la goualante : Chanter.
Pousser sa (son) glaire : Parler.
Prendre de bec (se) : Se dire des injures.
Prêter lanche , Prêter lauche, Prêter loche : Écouter.
Prise de bec : Engueulement.
Prouter : Porter plainte, gronder.



 
Q

Quatuor : Quatre d’un jeu de dominos. Les joueurs mélomanes ne manquent pas de dire : "Quatuor de Beethoven".
 

 
R

Ra-fla, Raf-la : Notes rudimentaires de la batterie du tambour. ”Le tambour-major bat la mesure des ra et des fla”.
Racler : Racler le boyau. Jouer mal du violon, ou de tout autre instrument à corde.
Racler du fromage : Jouer du violon. Râcleur de fromage, racleur de boyaux, mauvais joueur de violon.
Racler le boyau : Jouer du violon (argot des musiciens).
Raffut : Tapage (argot du peuple). Faire du bruit, de l’esclandre.
Ragoter : Murmurer, gronder sourdement. On dit aussi Ragonner.
Ramacher : Répéter continuellement la même chose, radotter, gronder, gromeler, faire de fréquens sermons, des réprimandes à n’en plus finir.
Raper, Râper : Chanter mal. Vieille expression de goguette pour qualifier un chanteur qui écorchait les oreilles de ses auditeurs. Mot à mot : il rapait sa chanson (argot du peuple). Chanter d’une manière monotone, ou chanter une chanson idiote, une chanson qui rappelle le bruit de la râpe.
Reconduire : Siffler (argot des coulisses). On dit aussi appeler Azor.
Recorder : Recorder ses violons. Pour dire, se disposer, s’apprêter à rire, à danser, à se divertir.
Rejaquer : Crier.
Remue-ménage : Tintamarre, trouble, désordre, querelle.
Renâcler : Crier après quelqu’un, gronder, murmurer.
Renaudeur : Grogneur, qui bougonne.
Rengaîner son compliment : Se taire
Rengracier : Changer de conversation. Se taire, imposer silence.
Renommée : Goguette, cabaret où l’on chante.
Requiem : Table d’hôte à très bon marché.
Rester en figure : Rester coi.
Ricasser : Rire bêtement, inutilement et sans motif apparent.
Richonner : Rire (argot des voleurs).


 

Rigolbocher : Cancaner à la façon de la danseuse Rigolboche qui protestait sans cesse quand le municipal la rappelait à l’ordre ou plutôt à la décence. Quelque chose de supérieurement amusant, beaucoup plus fort que rigolo. "Nous avons rudement rigolboché" (argot du peuple).

 

 

 

 

 

 

 

Robinet : On dit populairement d’un homme qui parle abondamment, d’un babillard, d’un bavard éternel, que quand une fois le robinet est lâché, il a de la peine à finir.
Rognonner : Gronder, marmonner, murmurer entre ses dents. Bougonner
Romancier : Chanteur qui a la spécialité des romances et autres "choses du cœur" (argot des cafés-concerts). Fort romancier. Premier chanteur de romances d’un café-concert. Forte romancière. Grosse femme qui chante avec efforts, et très mal, de petites choses sentimentales, très faciles à chanter.  

Rossignante : Flûte.
Rossignoler : Chanter.
Roucouler : Pour, chanter, faire des roulades ; se dit par raillerie de quelqu’un qui a la voix rauque et une mauvaise méthode de chant.

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Bien entendu, chacun de ces mots d’argot recensés ont d’autres sens que ceux pour lesquels nous les avons consignés ici de façon non exhaustive, ayant volontairement gommé les provenances historiographiques de la plupart d’entre ces mots et expressions pour aller plus directement à leur sens relatif au sonore et au musical. Vous pouvez néanmoins trouver plus d’informations sur chacun de ces mots et expressions directement sur ce dictionnaire en ligne, établi par Charles Boutler.

 

 

En ligne, ce dictionnaire d’argot français classique ARGOJI dont est tiré ce glossaire

 

“C'est la langue des orphelins, des bâtards et des putains.”  Eleanor Catton

à suivre ....  et aussi à noter un lexique de mots rares, anciens, parfois inusités ou méconnus, tous relatifs au monde du sonore et du musical : ICI

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