"... On dit que la musique est à Mogador un prolongement de la peau de ses habitants d'hier et d'aujourd'hui, de leurs résonances dans le monde, de leurs harmonies et de leurs contrepoints, de leurs éclats percutants et de leurs fugues, de leur regret au soleil quand il se couche et de leur joie au lever de la lune. Dans ce port, la peau a un très vieux nom, qui est synonyme de tambour. On raconte qu'il y a des siècles, avant d'ensevelir un mort, on faisait un tambour avec sa peau. Ce qui explique que les plus anciennes maisons soient pleines de ces instruments de musique, vénérés pendus aux murs. On les respecte, on les aime et on les décroche pour les caresser, façon d'évoquer les défunts de la famille; on les porte souvent aux endroits de la ville où les vents alizés soufflent au large avec le plus de force, et, là, on les agite jusqu'à ce qu'ils produisent de très faibles sons graves et cadencés. D'où le nom que l'on donne aux premiers souffles vespéraux des alizés, quand ils ont fait vibrer les peaux de tambours des morts: vents de requiem..."
Alberto Ruy-Sànchez
in "9 fois 9 choses que l'on dit de Mogador" - ed. Les Allusifs - 2006
Alberto Ruy-Sànchez
in "9 fois 9 choses que l'on dit de Mogador" - ed. Les Allusifs - 2006
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